ABC éditorial : Santé : le problème de chacun

La pandémie a fonctionné comme un accélérateur dans de nombreux aspects de la réalité. Certains problèmes qui auraient pu prendre plus de temps à se manifester ont fini par précipiter cette période d'exception. L'effondrement de nos soins de santé, en particulier en ce qui concerne les soins primaires, est l'un de ces exemples. Depuis des décennies, le système montre des signes de lassitude et les observateurs avertissent plus directement qu'un des piliers de l'État-providence commençait à se trouver dans une situation critique. Dans les années où il a dû offrir une couverture exceptionnellement demandée pour répondre au Covid-19, les fissures du système national de santé sont devenues un problème insurmontable.

La réforme de la santé et la bonne planification des moyens et du personnel existant doivent devenir un objectif prioritaire pour ceux qui ont des responsabilités gouvernementales. Il ne fait aucun doute qu'une utilisation diligente des fonds publics exige de faire passer les soins de santé des citoyens avant de nombreuses autres dépenses. Pour cette raison, parmi les nombreuses réflexions possibles, il faut se demander s'il est indispensable à long terme de continuer à dériver l'investissement public vers des amendes qui, de loin, semblent moins urgentes et centrales que la couverture sanitaire. Dans ce cas, citer cette question uniquement dans les dépenses serait simplifier une réalité complexe qui admet d'autres choses. Il ne s'agit pas exclusivement d'investir plus, mais aussi d'investir de manière plus rationnelle, flexible et planifiée. La structure de la démographie en Espagne montre que l'assistance médicale sera suffisante dans de nouvelles circonstances stressantes, donc, si nous ne faisons pas de réformes en profondeur, cette crise s'aggravera. Parmi les nombreux problèmes que connaît aujourd'hui notre pays, la santé et la nécessité d'élaborer des politiques publiques exécutives et efficaces sont devenues une urgence sans précédent. La mobilisation des personnels de santé et l'inquiétude grandissante que constatent les citoyens est une crise dont la situation va s'encadrer immédiatement.

La santé occupe une place fondamentale au sein du pacte social. Par ailleurs, le maintien d'une couverture santé universelle, gratuite et de qualité est un objectif suffisamment pertinent pour ne pas faire de la crise sanitaire un simple élément d'affrontement électoral. Un système de santé robuste n'est pas un bien facultatif ou un luxe dispensable : c'est la condition de possibilité de bien d'autres choses qui font la dignité de notre société. Malgré le bruit de fond, et si l'on regarde les indicateurs disponibles, il n'y a pas de données ou de preuves qui établissent que les soins de santé sont sensiblement plus élevés dans les territoires gouvernés par un parti politique ou un autre. Il n'est pas non plus crédible d'admettre que là où la couleur politique d'un gouvernement a changé, des transformations évidentes ont été générées. Ce serait une erreur de réduire une crise structurelle qui touche l'ensemble de l'Etat à des débats locaux reproduisant un simple intérêt de la part incompatible, très peu, avec la gravité et l'importance de l'affaire en cause. La gestion de la santé est un problème commun à toutes les zones du territoire et la casuistique démocratique, territoriale et soignante nécessite le respect d'une direction centralisée au ministère de la santé. Protéger la santé de ceux qui vivent sur un territoire spécifique devient impossible sans se soucier, globalement, des soins de santé de tout le pays. C'est aussi l'une des leçons apprises pendant la pandémie.

Comme si souvent, nous avons tendance à transformer des problèmes profondément enracinés en objet de dispute partisane. Il est innocent que l'attention du public et des médias se soit focalisée sur Madrid, réduisant un problème d'État à une cause régionale. Ce fait est non seulement injuste, mais empêche également le développement d'une analyse holistique qui correspondrait à un défi qui affecte toute l'Espagne. Cela étant, il semble clair que la présidente de la Communauté de Madrid se trompe si elle tente de réduire la crise sanitaire à une revendication syndicale ou des conditions de travail. La défense des soins de santé publics gratuits et de qualité est l'un des consensus dans lesquels la société espagnole se voit et se reconnaît comme un tout. Procurer des soins de santé durables dans le temps et cohérents avec les valeurs qui constituent l'épine dorsale de notre communauté politique est un objectif suffisamment important pour obliger nos politiciens à s'ajouter à eux-mêmes. Aborder la question de la santé de manière coordonnée est plus qu'une nécessité, c'est une occasion de marquer, en tant que pays, que nous pouvons continuer à faire des choses ensemble.