John Müller : Sánchez contre sa stratégie

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La stratégie espagnole de décarbonisation à long terme, approuvée par le gouvernement en 2020, suppose l'élimination des énergies fossiles, qui sont à elles seules responsables de 10 % des émissions réelles. Cela signifie qu'en 2050, l'Espagne, comme l'UE, sera nettement moins dépendante de la quantité de combustibles fossiles que nous vendons en Russie.

Ce plan, qui aurait dû être élaboré sur trois décennies, a été soudainement déstabilisé par l'invasion rusée de l'Ukraine. La raison de l'interrogation actuelle est politique et morale - il s'agit de punir Poutine pour l'agression - mais elle aurait bien pu être d'un autre type. Par exemple, s'il y avait eu un écart grave dans les objectifs

de l'atténuation du changement climatique, les experts auraient proclamé "l'urgence climatique" et nous auraient demandé de décarboner davantage et de faire plus de sacrifices.

L'affaire Poutine n'a donc rien fait de plus que de compresser les délais pour atteindre un objectif que nous nous étions fixé, celui de nous désengager des énergies fossiles. Cependant, la réaction du gouvernement espagnol est allée dans le sens inverse : la première chose a été de subventionner le prix du carburant pour essayer de faire baisser son prix et ne pas déprimer la demande et agacer les consommateurs ; la seconde, demander à Bruxelles de lui permettre de fixer le prix du gaz sur « l'îlot énergétique ».

Il convient alors de se demander : quel type de politiques économiques le gouvernement de Pedro Sánchez et la vice-présidente Teresa Ribera avaient-ils en tête pour concrétiser leur stratégie de transition énergétique si, lorsqu'il présente une situation favorable pour l'appliquer, il ne fait qu'agir encontre?

Ce qui est devenu clair, c'est que personne en Espagne n'est préparé aux sacrifices exigés par la guerre ou la transition énergétique. Pas même les pacifistes ou les écologistes. L'incohérence affichée par le gouvernement et ses mesures ne peut s'expliquer que par l'opportunisme enraciné de Pedro Sánchez, habitué à montrer sa taille et son jeu de jambes à chaque occasion. [email protected]